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L'uniforme
du marin
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L'origine
de l'uniforme du matelot de la Royale date
du règne de Louis XV. Quelques
textes imprécis datent de cette
époque. L'inventaire se
résume à un caban (mot
espagnol venant de "gaban" lui-même
issu de l'arabe signifiant manteau
à capuchon) de drap à
boutons de cuivre, à un large
pantalon de la même étoffe et
à un grand chapeau à bord
relevé.
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La
période révolutionnaire apportera
beaucoup, bien que les crédits en la
matière aient été toujours
inexistants. Le matelot "sans culotte" était
habillé d'une veste courte de couleur
foncée, d'un pantalon blanc strié de
bleu et d'un gilet rouge. Sous la veste une chemise
à grand col ouvert laissant apparaître
une cravate noire. On a beaucoup
épilogué quant à la couleur de
la cravate, signe de deuil après Trafalgar.
En fait les marins la portaient ainsi bien avant
cette tragique bataille, ainsi que leurs
antagonistes britanniques.
La
cravate noire est officiellement apparue
à l'article VII de
l'arrêté du 15 floréal
de l'an XII (5 mai 1804), relatif aux
vêtements que porteront les marins
composant les équipages des
bâtiments de la République :
"Les Officiers-mariniers, matelots,
novices et mousses auront tous veste et
pantalon bleu, le bouton de corne
timbré également d'une ancre
croisée de deux sabres, gilet
rouge, chapeau rond (orné d'une
ancre de métal et d'un ruban
flottant) et une cravate noire". Cette
cravate noire fut remplacée
à la fin de l'année 1835 par
un "mouchoir-cravate en coton rouge", mais
rétablie l'année suivante
par l'ordonnance du 11 octobre 1836 qui
prévoit simultanément une
cravate noire et une cravate en coton
rouge qui disparut très vite. Le
service de la documentation du
musée de la Marine note que la
cravate noire existe d'ailleurs dans la
plupart des marines
étrangères et n'a aucune
signification particulière. Voici
une légende qui s'effondre
!
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La
cravate n'est qu'un accessoire d'un uniforme que
les débuts de l'Empire n'ont guère
rendu heureux. Le matelot est en effet
engoncé dans un paletot à haut col.
Ce col permettait de reconnaître les
spécialités : bleu pour les gabiers,
rouge pour les canonniers, rose pour les timoniers
et cramoisi pour les charpentiers. En mer, le
pantalon était bleu, tandis qu'à
terre, il était blanc strié de rouge.
Pour compléter le tout, l'homme de mer
était nanti d'un fusil et d'une
baïonnette, de la giberne et de la banderole
en bufflerie blanche. Peu pratique cet uniforme a
soulevé de nombreuses protestations. Aussi
fut-il modifié six ans plus tard, en 1810.
La transformation fut plus heureuse et mieux
adapté aux conditions de la vie en
mer.
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Le
paletot fut transformé en gilet
à manches, en drap bleu croisant
amplement sur la poitrine. Deux pantalons
furent affectés au paquetage, l'un
en drap, l'autre en toile, tous les deux
de la même teinte, le bleu. Le
matelot, baptisé "canonnier
matelot" sous la Restauration fut
coiffé d'un casque. Le bleu devient
la couleur dominante de son costume, mais
il porte toujours un paletot orné,
cette fois de neufs boutons de cuivre,
situés de part et d'autre de la
poitrine, d'un col montant
échancré et
d'épaulettes. Il ressemblait plus
à un fantassin qu'à un homme
de mer. Sous Louis-Philippe, la veste est
raccourcie et ses revers
s'élargissent en se boutonnant sur
la chemise au col bleu pâle. Ce
fameux col ! Sa véritable origine
est très simple. Une ordonnance de
Louis XIV indiquait que "les cheveux du
soldat devaient être attachés
en catogan recouvert d'une corne noircie".
Cette corne signifie que
l'extrémité du catogan
était durcie par du noir de
fumée. Cette manière de
porter les cheveux était en effet
assez pratique pour le travail du soldat,
mais elle représentait
l'inconvénient de salir le col du
vêtement. Le grand col des marins
servait à protéger les
vêtements de la graisse des
cheveux.
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Plusieurs
explications fantaisistes agrémentent
naturellement l'histoire du col. L'une d'elle
affirme qu'on aurait pu attraper plus facilement
les hommes emportés par une lame, une autre,
qu'il devait être suffisamment large pour
servir de capuchon
Réglementairement
la chemise à col bleu figure pour la
première fois dans l'ordonnance du 11
octobre 1836, mais les trois lacets qui l'ornent ne
sont décrits d'une façon
précise que le 5 juin 1856 : "les lacets de
fil blanc ont 5 mm de largeur, espacés de 8
mm et le premier se trouve placé à 2
mm du col". Aucun texte officiel ne donne une
signification quelconque de ces lacets. C'est en
1856, sous le Second Empire, que l'uniforme
commence à s'approcher de celui que nous
connaissons.
Le
paletot est rendu plus gracieux et
rappelle même la disposition des
revers, le devant de l'habit des
officiers. Il est plus ample et se
boutonne à droite et à
gauche par deux rangées de neuf
gros boutons de cuivre. Et comme rien
n'est simple, le matelot porte au travail,
par-dessus le pantalon "à pont", un
"pantalon de fatigue, en toile rousse,
à brayette". Le pantalon à
pont était à l'époque
commun à tous les militaires. Le
devant n'offrant aucune
aspérité, il permettait
d'éviter tout accident dans les
voilures ou lors des
manuvres.
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L'apport de la chemise en coton fût une
véritable innovation "moderne". Elle se
composait de fils écrus et de fils teints
à l'indigo formant des raies alternatives
blanches et bleues, respectivement de 20 mm et de
10 mm de large. Son aspect n'a pas changé
depuis. C'est enfin en 1876 que la "brosse à
dents" fut rendue obligatoire et
réglementaire, utilisée une fois par
semaine. Si l'on commence à se
préoccuper de l'hygiène de l'homme de
troupe, l'évolution de l'uniforme n'est pas
encore achevée. En 1895, le jersey est
imposé en guise de veste, tandis qu'en 1901,
le bonnet cesse d'être en laine pour
être confectionné en drap bleu
foncé. Neuf ans plus tard, la chemise de
toile est remplacée par un col amovible et
le bonnet a pris sa forme
définitive.
Extrait
de la semaine de l'Île-de-France (25 octobre
1989).
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